Martin, 19 ans, tué à bout portant le 16 juillet 2009
Témoignage de Martine et Frédéric Mervoyer, parents de Martin, 19 ans, tué à bout portant le 16 juillet 2009 en Corse pour un cubi de vin. Martine et Frédéric ont participé à 2 programmes Sycomore en milieu carcéral en 2019.
J’ai témoigné de la mort de notre fils Martin, tué par arme à bout portant à la sortie d’une boîte de nuit le 16 Juillet 2009. J’avais bien entendu préparé un papier sur lequel j’avais écrit quelques points avec une grille donnée par Claudine au départ pour me guider dans mon témoignage et qui m’a permis de me préparer en toute sérénité. Quand mon tour est venu de prendre la parole, j’ai pu parler sans notes tellement l’assistance était attentive et respectueuse.
Après mon témoignage, il y a eu un temps de silence qui en disait long sur l’impact de mes paroles, puis certaines des 20 personnes détenues ont pris la parole et je n’oublierai jamais ce qu’ils m’ont dit, ce qui m’a beaucoup touchée. Je crois avoir beaucoup reçu de leur part, c’était aussi la première fois que je témoignais sans mon mari et cela m’a permis de m’exprimer vraiment en mon nom et pas en notre nom ce qui est forcément différent. J’ai pu laisser sortir mes émotions et être entendue jusqu’au bout par un auditoire très respectueux.
Frédéric partage ce qu’il a vécu lors d’une séquence Sycomore à laquelle il a été invité comme personne victime « Je me suis senti à l’aise, à ma place en tant que témoin, ému bien sûr car l’histoire est douloureuse, mais conscient que c’est vraiment nécessaire de témoigner. C’est une confrontation de personne à personne en vérité.
La session 6 est très différente car elle m’a donné vraiment l’impression de faire partie de l’équipe. J’ai eu le sentiment de retrouver une équipe que je connaissais davantage, des personnes détenues avec qui j’avais déjà parlé et de vrais liens se sont mis en place.
Je trouve que la démarche proposée est magnifique et bouleversante, j’étais ému de voir que ces hommes étaient en vérité. Rencontrer les personnes détenues en prison et de voir les rapports humains d’égal à égal est tout simplement incroyable. »
Martine partage son ressenti lors de son contact avec les personnes détenues, qui ont participé à Sycomore
J’avais déjà eu l’occasion de pénétrer le monde pénitentiaire et de témoigner devant des personnes détenues, mais le lien que nous avions créé ensemble n’a rien eu à voir avec celui qui s’est mis en place. J’ai d’abord été sidérée de voir chaque personne détenue arriver en nous saluant avec un franc sourire et le regard bien droit. On les sentait en confiance et heureux de faire ce parcours proposé. Ils arrivaient avec une vraie attente et semblaient trouver pour beaucoup, réponses à leurs questions et leurs attentes. La dernière journée du programme Sycomore, a été pour moi l’occasion de le vérifier. Les personnes détenues nous ont exprimé chacun à leur tour le bénéfice de leur expérience. Cela a été pour moi un moment essentiel, où j’ai réalisé combien nous étions semblables et qu’il s’en faut sans doute de peu pour se trouver de l’autre côté des barreaux. Ce peu-là est énorme, inexcusable et mérite d’être puni par la loi, mais ces hommes ne sont pas réduits seulement à ce qu’ils ont fait et on a envie vraiment de leur donner une deuxième chance. J’ai pu partager avec eux des moments personnels forts qui m’ont beaucoup interpellée.
Remarques de Martine sur les séquences 3 et 6 auxquelles elle a participé.
La troisième session est centrée sur le témoignage de ou des personnes victimes et semble être cruciale pour que la personne détenue prenne conscience des conséquences de ses actes. La journée 6 permet de constater les bénéfices de tout un travail d’équipe et de prendre la mesure du bien-fondé de leur expérience. Ils témoignent d’un vrai travail de prise de conscience de remords et d’un vrai désir de réparation. C’est tout simplement incroyable !
Que pourrait on améliorer pour que les personnes victimes se sentent à l’aise et comprennent le dispositif Sycomore ?
Martine témoigne : » Votre travail en amont sur les journées 1 et 2 préparent vraiment la rencontre entre témoin et personne détenue et je me suis sentie bien entourée d’emblée et parfaitement en sécurité. Vous m’avez dit et redit combien notre présence était essentielle et j’ai été touchée de la confiance que vous m’avez faite d’emblée. Votre approche est professionnelle et c’est encore pour moi aujourd’hui l’occasion de vous remercier pour m’avoir invitée à participer à ce projet magnifique. Je souhaite que ce parcours puisse être diffusé à travers toute la France, j’aurais aimé que l’assassin de notre fils ait pu poursuivre ce parcours. »